Emmanuel Macron a présenté aujourd’hui le “Plan Eau” qui comporte une cinquantaine de mesures. Ce plan, dont la présentation avait été plusieurs fois repoussée, est fortement attendu alors que la France connaît un niveau de recharge de ses nappes phréatiques historiquement bas qui laisse présager un nouvel été sous fort stress hydrique, après la multiplication ces dernières années des épisodes de sécheresses . Retour sur les principales annonces.
Le Président de la République, en déplacement à Savines-le-Lac (Hautes-Alpes), a dévoilé un plan qui se structure autour des axes suivants :
- Accélérer sur la sobriété : un plan d’ici la fin de l’été
Emmanuel Macron a indiqué qu’il serait demandé à chaque secteur “un plan en sobriété sur l’eau d’ici à l’été”. Les collectivités territoriales seront mobilisées sur ce volet alors que concernant les bâtiments de l’Etat le Président a annoncé que “les bâtiments de l’Etat seront équipés de mécanisme de récupération des eaux de pluie et d’équipements agro-économes”.
A l’image de la plateforme déployé dans le cadre de la crise énergétique pour faire face aux risques de délestage, il sera lancé un “Ecowatt de l’eau”. Le dossier de presse du Plan Eau précise qu’il s’agit d’un outil qui permettra de “connaître les restrictions qui s’appliquent en fonction de sa géolocalisation et de sa catégorie d’usager, et les écogestes recommandés au regard de la situation hydrologique locale”.
L’objectif affiché est “de faire 10% d’économie d’eau dans tous les secteurs“ d’ici 2030.
- Lutter contre les fuites et moderniser les réseaux
Les fuites dans les réseaux contribuent au gaspillage de la ressource en eau, (près d’1 litre sur 5) : il est nécessaire d’investir massivement dans ces derniers. Ont été évoqués lors de la présentation de ce plan les “170 points noirs” du territoire afin de désigner “les zones où les fuites sont les plus importantes, qui perdent plus de 50% de leur eau”. Afin de répondre à ce défi, 180 millions d’euros de financements ont été annoncés. Cette somme devrait aussi servir à renforcer l’approvisionnement en eau potable des communes qui ont subi de fortes tensions lors de l’été 2022.
- Investir dans la réutilisation des eaux usées
Sur cet axe l’objectif affiché est le suivant : passer d’1% de réutilisation des eaux usées actuellement à 10% de réutilisation des eaux usées en 2030. Le Président de la République a déclaré souhaiter l’identification de 1000 projets en cinq ans, en lien avec les collectivités territoriales, pour réutiliser les eaux usées.
- Accompagner les transformations du modèle agricole
Emmanuel Macron a souligné le besoin de “réinventer des modèles agricoles dans notre République”.
Une aide de 30 millions d’euros aux agriculteurs a été annoncée afin de développer des “systèmes intelligents” d’utilisation d’eau, comme l’irrigation au “goutte-à-goutte”. Un fonds de 30 millions d’euros pour l’hydraulique agricole devrait également être mis en place dans le but de maximiser l’infiltration dans les nappes phréatiques.
- Vers une tarification progressive de l’eau
Le président a défendu une “tarification progressive et responsable” de l’eau qui puisse être “généralisée en France “. “Les premiers mètres cubes sont facturés à un prix modeste, proche du prix coûtant” et “ensuite au-delà d’un certain niveau, le prix du mètre cube sera plus élevé” pour “les consommations (…) de confort et pour inciter à la sobriété”.
- Augmentation du budget des agences de l’eau
Les agences de l’eau, qui jouent un rôle clé dans le financement des politiques de l’eau, vont bénéficier d’une augmentation de leur budget qui s’élève à 2,2 milliards d’euros aujourd’hui. Emmanuel Macron a ainsi annoncé une hausse budgétaire “de 500 millions d’euros par an”.
Compétence eau et assainissement : vers davantage de différenciation ?
Alors que Christophe Béchu avait indiqué devant la délégation aux collectivités territoriales du Sénat le 9 février “qu’il n’aura pas la main qui tremble” pour confirmer l’échéance du transfert de la compétence eau aux intercommunalités. pointant du doigt une “corrélation entre gestion solitaire et défaut d’approvisionnement”, le président de la République a tenu un discours à la tonalité différente lors de la présentation du plan Eau.
Emmanuel Macron a indiqué vouloir “mettre beaucoup de souplesse et de l’apaisement”, et a ajouté “parfois le modèle de l’intercommunalité est le bon, parfois il faut mutualiser différemment”
Le Président de la République a également dit souhaiter “que l’on puisse consolider, partout où c’est accepté, le modèle de l’intercommunalité, et ensuite qu’on puisse trouver les bonnes solutions de mutualisation : nouveau syndicat possible, intercommunalité choisie, avec une accélération de l’investissement, avec un modèle pluriel différencié qui repose sur l’intelligence des élus de terrain et de la diversité du territoire.”
Pour rappel, entre le statu-quo législatif et un retour à une situation pre-2015, l’APVF défend la possibilité de prolongation du blocage du transfert de compétences par une minorité de communes comme cela est par exemple aujourd’hui possible pour les communes opposées au transfert de la compétence PLUi (article 135 de la loi ALUR). En l’état actuel, en cas de minorité de blocage, le transfert de compétences prendra malgré tout effet en 2026. Elle avait eu l’occasion de le rappeler lors de son audition mi-février par le Sénat.
Retrouvez le dossier de présentation des mesures du Plan Eau en cliquant ici