Refonte de la fiscalité locale : l’APVF demande une réforme ambitieuse et respectueuse de l’autonomie financière des collectivités territoriales

16 mai 2018

Financement de la suppression intégrale de la taxe d’habitation :

  1. TH dans les budgets locaux : 21,9 Md€ en 2016

En 2016, la taxe d’habitation a dégagé un produit fiscal de 21,9 Md€, soit 34 % des ressources fiscales du bloc communal.

La suppression intégrale de la TH représentera, pour le bloc communal, une perte de recettes estimée à 24,6 Md€ en 2020, ce à quoi la mission Bur-Richard propose d’ajouter, à l’instar du Comité des finances locales, environ 1,7 Md€ de compensations d’exonérations de TH qui disparaîtraient ainsi avec la suppression de cette imposition, soit un total de 26,3 Md€ environ.

Néanmoins, s’agissant de l’année de référence utilisée pour arrêter le montant de la recette fiscale de TH à compenser, la mission recommande d’appliquer aux bases de la dernière année avant la fin de la suppression de la TH les taux votés par les collectivités territoriales en 2018.

  1. Coût de la réforme : 10 milliards d’euros non intégrés à la trajectoire

Pour l’année 2018, le montant du dégrèvement de 30 % pour 80 % est estimé à 3 milliards d’euros par la direction du budget. Il sera de 6,6 milliards en 2019 et de 10,1 milliards en 2020, lorsque la réforme « dégrèvement des 80 % » aura pris son plein effet. Au total, la mesure de dégrèvement représente un coût de 19,7 milliards d’euros, intégré à la trajectoire des finances publiques telle que fixée par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

La mission évalue la charge supplémentaire résultant de la suppression intégrale de la TH à environ 10 milliards d’euros pour l’Etat, non intégrés à ce jour dans la trajectoire des finances publiques.

Cas des résidences secondaires et logements vacants :

La suppression intégrale de la TH vise à alléger la fiscalité des ménages à raison de leur résidence principale. Pour la mission Bur-Richard, il n’est donc pas nécessaire de l’étendre à la taxation des résidences secondaires et des logements vacants.

La contribution applicable à la généralité de ces logements reprendrait la TH des résidences secondaires sous la forme d’une contribution assise sur la base imposable de la TFPB avec un taux permettant le maintien de l’impôt antérieurement payé sauf allègement décidé par la collectivité compétente.

Dans les zones marquées par une tension du marché locatif serait instituée une majoration en pourcentage de cette contribution, succédant aux majorations précédentes. Cette majoration plafonnée par la loi serait fixée par la collectivité compétente (commune ou EPCI) pour inciter à une utilisation plus intensive des logements en cause, sans créer d’alourdissement fiscal au regard de l’existant.

Deux scénarios possibles pour remplacer la taxe d’habitation

  1. Scénario n° 1

Scénario n° 1 : réallocation des ressources existantes entre les départements et le bloc communal, et l’affectation d’une fraction d’impôt national aux départements.

Dans cette hypothèse, des mécanismes de garantie individuelle des ressources et des mécanismes incitatifs de modération fiscale de la TFPB (encadrement reposerait sur une progression « forfaitaire ») ainsi que de la CFE sont prévus par la mission Bur-Richard.

Deux principales modalités d’application du scénario n° 1 possibles :

  • Modalité α : la part départementale de la TFPB est transférée aux communes et aux EPCI au prorata de leurs anciennes recettes de TH.

Au niveau de chaque ensemble intercommunal, l’EPCI d’une part, l’ensemble des communes membres de l’EPCI d’autre part, se partageraient chacun une fraction de l’ancien taux de TFPB départementale en proportion de leurs anciennes recettes de TH.

Dans cette hypothèse, les EPCI et les communes sont compensés en grande partie par un impôt local avec pouvoir de taux.

Un mécanisme de garantie individuelle des ressources est nécessaire pour les deux niveaux mais les excédents à prélever et à redéployer ne sont pas très élevés : 600 M pour les communes et 100 M pour les EPCI.

Des compléments sous forme d’impôt national partagé, non territorialisé et sans pouvoir de taux, sont également nécessaires pour les deux niveaux.

Un surcroît de dotations de l’Etat pourrait être mobilisé.

  • Modalité β : les parts départementales et intercommunales de TFPB pourraient être intégralement transférées aux communes (1,3 Md€ en 2016).

Dans cette hypothèse, les communes n’ont pas besoin d’un complément en fiscalité partagée car les montants nationaux à répartir sont équivalents.

Les EPCI seraient quant à eux compensés de la perte de la TH par un impôt national partagé, comme la TVA.

72 % des communes de moins de 5 000 habitants reçoivent un produit supérieur à leur ancien produit de TH. Le montant à prélever sur les communes « surcompensées » serait donc de 3,4 Md d’euros. Un mécanisme de garantie individuelle des ressources est nécessaire pour les communes seulement.

Et les EPCI seraient quant à eux les seuls à devoir être compensés par transfert d’impôt national partagé.

  1. Scénario n° 2

Scénario n°2 : le transfert d’une fraction d’impôt national au bloc communal sans réallocation des recettes fiscales des départements.

Dans cette hypothèse, un surcroît de dotations de l’Etat serait sans doute mobilisé, mais pour un montant maximum de 9 Md€.

Pour la mission Bur-Richard, l’intérêt de ce scénario est avant tout pratique : nul besoin dans ce cas de créer un fonds de garantie des ressources.

  1. L’APVF favorable au scénario n° 1

Le bloc communal doit conserver des ressources fiscales avec pouvoir de taux. Et l’APVF étant attachée à l’autonomie financière et fiscale, elle s’est positionnée en faveur du scénario n° 1 de la mission Bur-Richard, soit le transfert de la part départementale de la TFPB au bloc communal.

S’agissant de la mise en oeuvre du mécanisme de garantie individuelle des ressources, l’APVF s’oppose à la récupération par l’Etat des excédents des communes et des EPCI « surcompensés » et de la redistribution des excédents via le transfert d’une fraction d’impôt national.

L’APVF réitère, en outre, son refus d’une compensation, même simplement complémentaire, par dotations d’Etat dont on sait, par expérience, qu’elles ne sont jamais pérennes dans leur montant, ni dans le temps.

Réforme de la taxe foncière sur les propriétés bâties

L’APVF rappelle, enfin, son souhait d’une mise en œuvre rapide de la révision des bases de la TFPB, à l’instar du calendrier proposé par la mission Bur-Richard : 2023 ou 2024.

Elle n’est pas favorable à un étalement sur 40 ans de la révision, comme le suggérait Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, lorsqu’il proposait de ne soumettre aux nouvelles bases que les locaux mis en vente/vendus.

Téléchargez le rapport de la mission Bur-Richard relatif à la fiscalité locale