Narcotrafic : « Nous luttons avec un pistolet à eau contre des criminels. » Jérôme Durain, Sénateur

3 avril 2025

À l’invitation de Jean-Pierre Bouquet, référent sécurité de l’APVF, Maire de Vitry-le-François et membre du Bureau de l’APVF, la commission sécurité s’est réunie pour aborder la question du narcotrafic dans les petites villes. Ce phénomène, véritable source de préoccupation pour les maires de nos petites villes, place ces derniers en première ligne face au développement des réseaux criminels sur leurs territoires. En 2022, 46 des 47 aires urbaines présentant les plus forts taux de mis en cause comptaient moins de 100 000 habitants, illustrant la vulnérabilité des villes moyennes et petites villes.

Le sénateur socialiste Jérôme Durain à l’initiative, avec le sénateur LR Étienne Blanc, de la proposition de loi sur le narcotrafic après avoir présidé la commission d’enquête éponyme, est intervenu comme grand témoin lors de la commission sécurité du mardi 1er avril. Il a dressé un état des lieux de l’expansion du trafic de drogue en France et de ses conséquences : hausse de la criminalité, sentiment d’insécurité croissant et emprise démocratique. Il a dénoncé l’asymétrie des moyens de police et de justice face à ses réseaux organisés, illustrant la situation par une formule frappante : « Nous luttons avec un pistolet à eau contre des criminels. »

Dans ce contexte, la proposition de loi « visant à sortir la France du piège du narcotrafic » entend structurer une réponse plus efficace, alors que le trafic ferait vivre près de 240 000 personnes pour un chiffre d’affaires estimé entre 3 et 6 milliards d’euros, tandis que seules 117 millions d’euros sont actuellement saisies.

Les maires pris en étau

La question du rôle des maires face à ce fléau s’est également posée. Trop souvent, ces derniers se retrouvent au cœur des tensions, pris entre les attentes de leurs administrés et leurs moyens d’action souvent limités. Jérôme Durain résume bien cette pression en évoquant « une cible sur le buste de Marianne. » Pour l’APVF, il est essentiel que les élus locaux ne soient pas en première ligne de la lutte contre le narcotrafic, une mission qui relève avant tout des prérogatives régaliennes de l’État.

Un cadre juridique renforcé, mais quels moyens concrets ?

Hasard du calendrier, alors que la commission sécurité se tenait à 14h30, l’Assemblée nationale adoptait, trois heures plus tard, le texte sur le narcotrafic. Cette loi apporte donc des avancées significatives, parmi lesquelles, entre autres, :

  • Renforcement de l’OFAST (Office anti-stupéfiants).
  • Création du Parquet national anti-criminalité organisée (PNACO), prévu pour 2026.
  • Nouveaux outils anti-blanchiment, incluant la fermeture administrative des commerces liés au trafic, une mesure attendue par les maires.
  • Amélioration du renseignement, avec des interceptions satellitaires et la prolongation de la surveillance algorithmique.
  • Création d’un régime carcéral plus strict pour les 700 à 800 détenus les plus dangereux, afin de couper leur lien avec les réseaux criminels.

Cette loi marque donc un premier pas pour soulager les élus locaux, qui ne peuvent pas, seuls, pallier les carences dans la lutte contre le narcotrafic. Si l’État affirme ainsi sa responsabilité, les maires attendent désormais la mise en place de moyens concrets sur le terrain, à la hauteur des ambitions affichées. Cette réunion a permis aux membres de la commission sécurité de confronter leurs expériences avec Jérome Durain, un élu engagé et fin connaisseur de ces enjeux, en espérant que les mesures adoptées ne restent pas lettre morte sans les moyens financiers et humains adéquats.