Entre ZAN et TRACE : l’artificialisation des sols de nouveau en question au Sénat

6 février 2025

La proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation, concertée avec les élus (TRACE), sera examinée au Sénat les 12, 13 et 18 mars prochains. Portée par les sénateurs Jean-Baptiste Blanc (LR, Vaucluse) et Guislain Cambier (UC, Nord), elle a pour objectif d’assouplir la mise en œuvre du dispositif ZAN (Zéro Artificialisation Nette) issu de la loi Climat et Résilience. La position de l’Association des Petites Villes de France, recueillie par le biais d’un questionnaire, a été prise en compte par les rapporteurs des commissions des affaires économiques et de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Un constat unanime : une application difficile du ZAN

Adoptée en 2021, la loi Climat et Résilience impose une réduction progressive de l’artificialisation des sols afin d’atteindre l’objectif de Zéro Artificialisation Nette d’ici 2050. Toutefois, de nombreux élus locaux ont alerté sur les difficultés d’application de cette mesure, notamment dans les territoires ruraux et périurbains. Le Président de l’APVF et Maire de Barentin (76), Christophe Bouillon, soulignait dès 2023 les nombreux obstacles à la réussite du ZAN, citant notamment « les contraintes techniques et réglementaires, le manque de financements et le besoin d’ingénierie ».

L’APVF : le relais des inquiétudes des maires des petites villes

Face à ces défis, l’APVF a très tôt relayé les inquiétudes des maires des petites villes et cherché à influer sur l’action gouvernementale, notamment par la voix de son Président et à travers la formulation de 15 propositions pour réussir ce dispositif. Celles-ci s’articulent autour de trois priorités : clarifier la mise en œuvre du ZAN en instaurant un véritable dialogue entre l’État et les collectivités, adapter ses objectifs aux réalités locales afin de ne pas freiner les projets structurants des petites villes, et renforcer les moyens financiers et techniques pour accompagner les communes dans la transition. Loin de remettre en cause l’ambition écologique du dispositif, l’APVF plaide pour une application pragmatique et équitable qui permette aux petites villes de concilier sobriété foncière et développement territorial.

Des ajustements souhaités pour une “trajectoire réaliste”

Le texte TRACE, en débat au Sénat en mars, propose plusieurs ajustements :

  • Une simplification des modalités de comptabilisation de l’artificialisation des sols.
  • Un assouplissement de la trajectoire de réduction entre 2021 et 2031, sans remettre en cause l’objectif final de 2050.
  • Une territorialisation des objectifs en fonction des besoins et des projets des collectivités locales.
  • La mutualisation de l’hectare communal à l’échelle des intercommunalités (EPCI) et des schémas de cohérence territoriale (SCoT).
  • Une flexibilisation du cadre réglementaire, notamment en permettant aux Conférences régionales de gouvernance de s’affranchir du caractère prescriptif des schémas régionaux d’aménagement (Sraddet).

Un équilibre entre préservation des sols et développement territorial

Si la proposition de loi vise à introduire davantage de pragmatisme, le gouvernement rappelle que l’objectif de réduction de l’artificialisation doit rester prioritaire. Le ministre de l’Aménagement du territoire, François Rebsamen, a ainsi proposé de repousser de 2031 à 2034 le point d’étape intermédiaire afin de mieux évaluer les effets des mesures engagées.

La consommation des espaces artificialisés demeure un enjeu majeur : en moyenne, 20 000 hectares sont urbanisés chaque année, dont 66 % pour l’habitat, 24 % pour l’activité économique et 5 % pour les infrastructures routières. La concentration de cette consommation dans certaines communes en déclin démographique illustre la nécessité d’une meilleure planification et adaptation des politiques d’aménagement.

L’examen de cette proposition de loi au Sénat sera donc un moment clé pour l’avenir du ZAN. Il s’agira de trouver un équilibre entre la préservation des sols et le développement local, afin d’accompagner les collectivités vers une transition plus soutenable et réaliste.