Location des meublés touristiques : le Sénat renforce le rôle des maires  

23 mai 2024

Après l’Assemblée nationale, c’est au tour du Sénat de se saisir de la question de la régulation des meublés touristiques. Le mardi 21 mai, les sénateurs ont modifié et adopté, à une écrasante majorité, la proposition de loi qui avait été votée par l’Assemblée nationale fin janvier. Diminution de la niche fiscale pour les propriétaires mais aussi outils supplémentaires pour les élus locaux : retour sur les mesures adoptées par les sénateurs et sur leurs conséquences pour les petites villes.

 

C’est à la quasi-unanimité que les sénateurs ont adopté, mardi dernier, la proposition de loi (PPL) visant à renforcer la régulation du marché des meublés touristiques de type Airbnb. Une initiative très attendue par les élus locaux à l’heure où de nombreuses petits villes sont confrontées aux excès de la location des meublés de tourisme, synonymes de flambée des prix de l’immobilier et de pénurie de logements.

Même si son objectif principal, à savoir lutter contre le manque de logements à l’année dans certaines zones touristiques, semble depuis longtemps partagé par les différents groupes politiques, le texte a tout de fois été l’objet de pas moins de 27 amendements. C’est au total huit articles qui ont ainsi été adoptés (contre trois articles dans la version votée par les députés).

Malgré ces modifications, les trois points saillants de la proposition ont substantiellement été conservés : l’élargissement des outils dont sont dotés les élus pour réglementer l’implantation des locaux à usage touristique sur leur territoire (1), l’alignement de la fiscalité des meublés touristiques non classés sur celle des locations nues de longue durée (2) ainsi que la soumission des meublés de tourisme à la réalisation préalable d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) (3).

Des mesures plus que bienvenues alors que l’APVF appelle depuis plusieurs mois à élargir les compétences des maires en matière de régulation des locaux à usage touristique et à aligner la fiscalité des meublés touristiques sur celle des locations nues de longue durée.

Une boite à outils pour les maires

Le texte vise tout d’abord à mettre à la disposition des maires une “boîte à outils” afin de réguler l’offre de meublés de tourisme sur leur territoire.  Ainsi, le loueur lui-même, et non un mandataire, sera tenu de réaliser une déclaration préalable auprès d’un téléservice national. Une mesure qui permettra aux communes de retrouver l’identité réelle du loueur pour effectuer des contrôles. En accédant à ces données, les communes ou leurs intercommunalités pourront ainsi suspendre la validité des numéros de déclaration en cas d’informations transmises erronées ou manquantes.

De plus, les propriétaires qui ambitionneraient de louer leur résidence principale en meublé touristique devront présenter leur dernier avis d’imposition sur leur revenu faisant mention de l’adresse du meublé comme lieu d’imposition.

Une autre mesure prévoit qu’il pourra être fait injonction aux plateformes de location type Airbnb de transmettre, aux communes qui le souhaitent, certaines données sur les meublés de tourisme loués par leur intermédiaire.

Par ailleurs, la “boîte à outils” comprend également l’élargissement et la facilitation du recours par la commune au régime d’autorisation préalable au changement d’usage. Une servitude de résidence principale pour les constructions nouvelles dans certaines zones est ainsi créée.

Par ailleurs, les maires ne pourront finalement pas abaisser de 120 à 90 jours par an la durée maximale de location d’une résidence principale ; le Sénat ayant estimé que cette mesure n’impacterait pas directement l’offre de logements mise à la location sur le long terme.

A noter que le titre de la proposition de loi a été modifié et vise dorénavant à “renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale” afin d’insister sur le rôle renforcé joué par les élus locaux.

Par ailleurs, d’autres amendements renforcent les obligations des loueurs, à l’instar de l’obligation d’attester que  le meublé touristique respecte les obligations de sécurité incendie et électrique applicables aux locaux à usage d’habitation ou encore de la possibilité de suspendre du numéro de déclaration lorsque le loueur n’a pas obtenu d’autorisation de changement d’usage si elle est nécessaire.

Concernant le DPE, les propriétaires de meublés touristiques seront obligés de se soumettre aux exigences de décence énergétique et afficher une étiquette allant de “A” et “E” jusqu’à fin 2033 et de “A” à “D” à partir de 2034. Un délai qui a donc été allongé de cinq ans par rapport au texte adopté par les députés.

De plus, le maire pourra demander, quand il le souhaite, au propriétaire d’un meublé touristique de lui transmettre dans un délai de deux mois le DPE en cours de validité (sous peine sinon d’une astreinte de cent euros par jour au profit de la commune).

Marche arrière sur la fiscalité

Enfin, s’agissant de la fiscalité, l’ambition initiale de la PPL a été revue à la baisse.

Pour rappel, alors que les meublés touristiques bénéficient actuellement d’un abattement de 71 %, contre 30 % pour les locations classiques, le Sénat avait voté un amendement dans  le projet de loi de finances visant à réduire cet abattement à 50 % pour les meublés touristiques classés et à 30 % pour les biens non classés. Un amendement qui avait été conservé par erreur par le Gouvernement, lors de l’adoption du projet de loi finances par 49.3.

Dans ce contexte, les députés ont souhaité aller encore plus loin en votant abattement généralisé à 30 %, que le logement soit classé ou non. Une proposition qui n’a pas été retenue par les sénateurs : ces derniers ayant souhaité remonter l’abattement à 50 % pour les meublés classés avec un plafond de recettes à 77 000 euros.

Des sujets qui seront au cœur des débats lors la commission mixte partitaire (CMP), prochaine étape pour cette PPL, et qui devrait se réunir dans les prochains jours.

 

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