PPL ZAN : les députés modifient le texte du Sénat

29 juin 2023

Le 27 juin 2023, les députés ont adopté, à une large majorité, la proposition de loi sénatoriale visant à améliorer la mise en œuvre des objectifs de Zéro Artificialisation Nette (ZAN). A l’issue de vifs débats à l’Assemblée – où 621 amendements ont été examinés et 39 adoptés – c’est un bilan en demi-teinte pour les élus locaux : même si les députés ont raboté plusieurs dispositions prévues par le Sénat, ils ont également validé certaines mesures importantes.

 

Une réduction du délai supplémentaire pour adapter les Sraddet : six mois au lieu d’un an

S’agissant du calendrier  tout d’abord, les députés ont voté un report de six mois, pour l’intégration de la territorialisation des objectifs du ZAN dans les Sraddet. L’échéance est ainsi portée à août 2024, au lieu de février 2024. Une souplesse de calendrier bienvenue par les maires des Petites Villes même si elle paraît décevante par rapport au texte adopté par le Sénat. Ce dernier proposait en effet un délai supplémentaire d’un an, soit jusqu’à février 2025.

Une suppression du « droit de préemption » sur les espaces propices à la renaturation et au recyclage

Autre source de déception pour les élus locaux : la suppression par les députés du « droit de préemption » portant sur les espaces propices à la renaturation et au recyclage foncier. Cette mesure avait été votée par les sénateurs et encouragée par l’APVF.

Restriction de la « garantie rurale » aux communes peu denses et très peu denses

S’agissant de la garantie rurale, l’article 7 prévoit finalement que les communes classées « peu denses » ou « très peu denses » selon l’INSEE (et dotées d’un PLU, d’une carte communale ou d’un document en tenant lieu avant le 22 août 2026) se verront garantir une surface minimale de 1 hectare de consommation d’espaces naturels agricoles ou forestiers. Le périmètre des communes éligibles à cette garantie rurale a donc été réduit puisque les sénateurs souhaitaient, quant à eux, que toutes les communes puissent en bénéficier.

Au menu des réjouissances cependant : la prise en compte du recul du trait de côté et l’instauration d’un sursis à statuer

Malgré ces déceptions, le texte adopté par le Palais Bourbon a permis de confirmer certaines dispositions souhaitées par les élus locaux. Ainsi, les députés ont validé la prise en compte du recul du trait de côte que l’APVF appelait de ses vœux. L’Assemblée nationale a validé la possibilité de considérer comme désartificialisés des biens situés dans une zone exposée au recul du trait de côte, dès lors que ces derniers ont vocation à être renaturés dans le cadre d’un projet de recomposition spatiale du territoire littoral faisant l’objet d’un projet partenarial d’aménagement.

S’agissant de l’instauration d’un « sursis à statuer »,  les occupants du Palais Bourbon ont voté la possibilité, pour l’autorité compétente en matière de PLU, d’instituer par dérogation dans certaines zones ouvertes à l’urbanisation un périmètre au sein duquel, il peut être sursis à statuer sur toute demande d’autorisation d’urbanisme entraînant une consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers susceptible de compromettre l’atteinte des objectifs de sobriété foncière durant la première tranche de dix années. Cette mesure est accueillie positivement par les maires des Petites villes qui appelaient à la création d’un « sursis à statuer ZAN ».

Les projets d’intérêt général majeur : un forfait national plutôt qu’une comptabilisation dans les enveloppes régionales d’artificialisation

Sujet à de vifs débats, l’article 4 permet de préciser les projets d’envergure nationale ou européenne qui présentent un intérêt général majeur en dressant une liste de « projets structurants de demain ». Comme le souhaitaient de nombreux maires de Petites Villes, ces projets ne seront pas comptabilisés dans les objectifs fixés par les documents de planification régionale et d’urbanisme. Toutefois, ces derniers seront comptabilisés dans un forfait national fixé à hauteur de 15 000 hectares pour l’ensemble du pays d’ici à 2031 (sur 125 000 hectares artificialisables ).

L’Assemblée nationale a également allongé la liste des projets, en ajoutant par exemple les travaux ou les opérations de construction de lignes ferroviaires à grande vitesse ou encore les travaux intéressants la défense ou la sécurité nationale.

Ayant fait l’objet d’un bras de fer entre Bercy et le Ministère de la Transition Ecologique, les « projets industriels d’intérêt majeur » pour la souveraineté nationale ou la transition écologique seront finalement bien comptabilisés dans l’enveloppe nationale du ZAN.

Validation de la création d’une « conférence régionale du ZAN »

Enfin, le Palais Bourbon a également validé la proposition du Sénat de créer une conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols. Cette dernière pourra se réunir sur tout sujet lié à la mise en œuvre des objectifs de sobriété foncière et transmettre à l’État des propositions sur ce sujet. Elle sera également consultée dans le cadre de la qualification des projets d’ampleur nationale ou européenne et d’intérêt général majeur, ainsi que sur la qualification de projets d’ampleur régionale.

Une légifération par décrets confirmée

Il convient enfin de noter que plusieurs articles de la proposition de loi sénatoriale ont été retirés du texte et seront adoptés par décrets, comme l’avait annoncé le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu. Une décision justifiée par le calendrier contraint : l’exécutif souhaite en effet une adoption définitive du texte au plus tard mi-juillet, soit avant la pause estivale et les élections sénatoriales prévues à la rentrée.

Alors que le pouvoir prescriptif du Sraddet sur les objectifs territorialisés du ZAN constituait un point de non-retour pour les associations d’élus du bloc local, l’un des deux projets de décrets vise notamment à privilégier « une approche plus proportionnée et qualitative du rôle de la région ». Ainsi, la fixation d’une cible chiffrée d’artificialisation à l’échelle infrarégionale, dans les règles générales du Sraddet, ne devrait plus être obligatoire afin de « ne pas conduire à contraindre de façon excessive les documents infrarégionaux ».

Renommée proposition de loi « visant à renforcer l’accompagnement des élus locaux dans la mise en œuvre de la lutte contre l’artificialisation des sol », le texte sera étudié en commission mixte paritaire (CMP) au plus tard le 13 juillet. Objectif : permettre aux sénateurs et aux députés de trouver un terrain d’entente.

 

Accéder au dossier législatif de la proposition de loi