L’APVF représentée par son Premier vice-président, Antoine Homé, a été auditionnée le 10 mai par la mission d’information du Sénat sur l’impact des décisions réglementaires et budgétaires de l’État sur l’équilibre financier des collectivités locales.
L’inflation normative impacte particulièrement les petites villes. C’est ce que Christophe Bouillon, Président de l’APVF avait déjà eu l’occasion de rappeler lors des Etats généraux de la simplification qui se sont déroulés le 16 mars dernier. L’APVF a, en effet, cette particularité de regrouper des communes aux profils très diversifiés, avec des problématiques singulières. Ainsi, les petites villes constituent à la fois un champ d’étude riche et intéressant, mais répondre à leurs enjeux multiples n’est pas chose aisée. La vocation universaliste de la norme apporte la sécurité attendue par certains Maires, mais peut avoir pour effet de brider l’action des autres.
L’équilibre n’est pas toujours évident à trouver et les petites villes en sont l’illustration : un accompagnement renforcé pour certaines petites villes en manque d’ingénierie, une réponse adaptée aux enjeux des petites villes « bourgs-centres » et une certaine agilité dans les territoires très attractifs où de plus en plus d’habitants à forte conscience écologique s’installent.
Pourtant, face à ces enjeux spécifiques, plusieurs constats. Un sentiment d’abandon exprimé par de nombreux élus locaux de petites villes, qui ne se sentent pas suffisamment accompagnés par l’Etat et ses services déconcentrés, des normes foisonnantes et de plus en plus complexes qui freinent l’action publique locale dans les domaines les plus stratégiques (transition énergétique, écologique…) et, enfin, une recentralisation financière qui remet en cause le sens de la décentralisation et porte atteinte aux responsabilités locales. Finalement, un Etat qui n’est pas là où il est attendu (Etat facilitateur, accompagnateur), et trop présent là où il ne devrait pas (Etat hypercentralisé).
Antoine Homé a indiqué aux rapporteurs de la mission que les élus locaux n’ont pas suffisamment de prises sur les décisions qui les impacte, y compris dans le cadre d’instances de concertation telles le Comité des finances locales (CFL) ou le CNEN. Le gouvernement n’est obligé de consulter le CFL que pour les projets de décrets. Dans les autres cas (projets de loi, projet d’amendement ou tout autres disposition réglementaires à caractère financier concernant les collectivités territoriale), il s’agit d’une simple faculté, rarement utilisée. Lorsqu’il est consulté, le CFL n’a ni pouvoir d’amendement, ni droit de réserve. Les membres du CFL votent ou rejettent en bloc un projet de décret, mais ne peuvent l’amender, ni émettre des réserves. Le dernier mot appartient au Gouvernement. Le CNEN est, quant à lui, une instance d’évaluation (en amont) des normes applicables aux collectivités territoriales. Est-il pour autant une instance de co-construction des normes, tel que le souhaitait le législateur ? Cela n’est pas certain, certaines limites peuvent là aussi être mises en avant : la saisine du CNEN est restreinte et les délais d’examen des textes, et notamment ceux de la procédure d’urgence sont très resserrés, ne facilitant pas les travaux du CNEN.
Le Premier vice-président de l’APVF a rappelé le besoin d’agilité exprimé par les Maires de petites villes dans un contexte où les crises se multiplient et où l’instabilité devient le cadre. C’est ce qu’il ressort en effet d’une enquête flash réalisée par l’APVF en janvier dans la perspective des états généraux de la simplification, avec trois principaux enseignements :
– pour 83,5 % des petites villes répondantes, la situation normative s’est dégradée depuis 3 ans. Aucun considère qu’elle ne s’est améliorée.
– la complexité des normes, ou tout simplement l’injonction qu’elle porte, entraine très souvent des surcoûts dont on ne peut se soustraire (exemple : la revalorisation du point d’indice), ou dont on ne peut échapper si l’on veut mener à terme les projets locaux.
– la contradiction entre les normes applicables n’est pas la principale difficulté ressentie par les Maires, mais elle demeure une source régulièrement invoquée dans les domaines de l’urbanisme et de la commande publique ;
– c’est dans les domaine urbanistique et de la commande publique que les attentes de simplification sont les plus fortes, suivies de plus loin par le logement social et l’assainissement.
En conclusion, Antoine Homé a relayé quelques illustrations concrètes, telles l’incompatibilité du décret tertiaire avec les normes relatives à l’accessibilité, l’incompatibilité entre accessibilité et urbanisme, l’automatisation du FCTVA qui engendre de nouvelles sources de complexité, et la problématique de l’usage restreint de l’eau de pluie pour les sanitaires des bâtiments publics dans un contexte de raréfaction de l’eau. L’affaire ubuesque du poulailler mobile de la Ville de Villepreux est aussi symptomatique : « à l’heure où l’on souhaite accompagner nos agriculteurs, véritables acteurs économiques et qui veulent œuvrer dans le développement durable, on se trouve confrontés encore à des freins et de normes qui viennent empêcher ou bloquer un certain nombre de projets qui, sur le papiers, paraissent pourtant très simples » (Jean-Baptiste Hamonic, Maire de Villepreux).