Le 16 mars 2023, le Sénat a adopté en séance plénière la proposition de loi “visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs du ZAN au cœur des territoires” portée par Jean-Baptiste Blanc (Vaucluse – LR) et Valérie Létard (Union centriste – Nord) et issue d’une mission transpartisane. Retour sur les principales avancées de ce texte qui s’aligne avec plusieurs propositions que l’APVF avait formulées en janvier dernier…
Première victoire dans le texte adopté par la chambre haute : l’assouplissement du calendrier que l’APVF avait appelé de ses vœux. Ainsi, le délai d’entrée en vigueur des Sraddet modifiés intégrant les objectifs de la loi Climat et Résilience est prolongé d’un an.
Concernant le décompte d’artificialisation, plusieurs ajouts sont également accueillis favorablement par l’APVF qui avait proposé de ne pas comptabiliser dans les enveloppes d’artificialisation les grands projets d’envergure régionale, nationale et européenne. Ainsi, le texte sort du décompte d’artificialisation les projets de « construction, d’aménagement, d’infrastructures ou d’équipements d’ampleur nationale ou européenne et qui présentent un intérêt général majeur ». A cela, s’ajoute notamment :
- les projets relevant d’une concession de service public de l’État ;
- les projets « d’implantation d’unités industrielles valorisant l’utilisation d’une ressource naturelle renouvelable, concourant à la transition énergétique, ou relevant de l’indépendance nationale, ou représentant un intérêt pour la souveraineté économique nationale ou européenne» ;
- ou encore «toutes actions ou opérations d’aménagement réalisées au sein des circonscriptions des grands ports maritimes ou fluvio-maritimes de l’État ».
A noter que ces projets feront l’objet d’une inscription dans le Sraddet, après avis des communes et des EPCI « sur le territoire desquels ces projets sont implantés » et de la conférence régionale du ZAN : instance nouvellement instaurée par le texte.
Ayant également réclamé l’adaptation des objectifs du ZAN aux communes soumises au recul du trait de côte, l’APVF se réjouit que le texte adopté précise que « les surfaces artificialisées rendues impropres à l’usage en raison de l’érosion côtière ayant fait l’objet d’une renaturation » seront décomptées de l’artificialisation.
Concernant la nomenclature des sols, dont une deuxième mouture devrait voir le jour d’ici juin, le texte reconnaît comme non artificialisée « une surface à usage résidentiel, de loisirs, ou d’infrastructures de transport, dont les sols sont couverts par une végétation herbacée ». A la suite des débats en séance publique « une surface occupée par des constructions, des installations et des aménagements nécessaires à l’exploitation agricole » ne sera pas non plus comptabilisée. Des modifications plutôt bienvenues pour l’APVF qui avait appelé à une meilleure prise en compte de la qualité des projets dans les calculs d’artificialisation.
Autre bonne nouvelle : le texte conserve ses dispositifs initiaux de sursis à statuer sur certains permis, et de droit de préemption « sur les espaces propices à la renaturation ou au recyclage foncier » : nouveaux outils dont l’APVF avait encouragé la création afin que les Maires puissent agir plus rapidement dans la période transitoire.
L’État est également tenu de mettre gratuitement à disposition des collectivités, et en format numérique, les « données complètes et continues de consommation d’Enaf, d’artificialisation et de renaturation des sols (…), ainsi que les données et les cartographies relatives aux friches établies par l’État. » Sur le sujet des friches, leur statut a aussi été clarifié afin qu’elles soient clairement désignées comme des surfaces artificialisées, et faciliter leur réhabilitation. Ainsi, leur réutilisation n’entraînera pas de consommation d’espaces et, à l’inverse, leur renaturation améliorera le solde net d’artificialisation de la collectivité. Bien que favorable à cette mesure, l’APVF souhaite aussi un renforcement du « fonds friches » et une meilleure réponse de l’Etat face au besoin d’ingénierie des collectivités afin d’accompagner davantage les efforts de réindustrialisation, de récupération foncière et de renouvellement urbain.
Enfin, afin de garantir à chaque commune que la mise en œuvre du ZAN n’entraîne pas un gel de son développement, le texte offre une « surface minimale de développement communal » d’un hectare. Les sénateurs ont en outre prévu une majoration pour les communes nouvelles de 0,5 hectare par commune déléguée, plafonnée à deux hectares. Les sénateurs ont rejeté l’amendement du gouvernement qui était en faveur d’une enveloppe minimale d’artificialisation équivalent à 1% de la surface urbanisée des communes rurales peu denses.
Le texte devrait être inscrit prochainement à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale où des députés Renaissances ont déjà déposé mi-février leur propre proposition de loi pour accompagner les élus locaux dans la mise en œuvre du ZAN. Même si le gouvernement a déclenché la procédure accélérée sur le texte du Sénat, un accord entre députés et sénateurs s’annonce difficile. Alors qu’au Sénat, le gouvernement a contesté par amendements 6 des 13 articles (rejetés par le Sénat), la dynamique risque d’être différente au Palais Bourbon où le gouvernement dispose d’une majorité, même relative.
Accéder au dossier législatif de la proposition de loi sur le ZAN adoptée par le Sénat