Inaugurations : justifier la date !

27 mai 2021

Depuis le 1er septembre 2020, dans les communes et intercommunalités dont un membre de la majorité est candidat aux élections départementales ou régionales de juin 2021, non seulement les supports de communication doivent être surveillés, mais les décisions d’organiser telle ou telle manifestation doivent également être contrôlées afin d’éviter qu’elles soient requalifiées elles-mêmes (sans considération pour la communication afférente) de campagnes de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion de la collectivité interdites par l’article L.52-1 du code électoral. C’est en particulier le cas des inaugurations, qui doivent être préparées avec soin pour éviter tout risque juridique.

Certes, les inaugurations ne sont pas, par principe, interdites en période électorale (CE, 13 novembre 1998, Election régionale de Guadeloupe, n°194987). En principe, des inaugurations peuvent être organisées jusqu’à une date très proche du scrutin : l’organisation d’inaugurations 13, 8 et 7 jours avant le premier tour de scrutin n’a pas été, en tant que telle, sanctionnée (CC, n°97-2193 du 9 janvier 1998, AN, Aveyron).

Néanmoins le critère de leur légalité est particulier : leur date doit toujours être justifiée par le calendrier des travaux ou en fonction de circonstances étrangères à la tenue des prochaines élections. Le juge vérifie que les différentes inaugurations auxquelles le maire sortant a procédé n’ont pas été anticipées ou retardées en vue d’influer sur le vote prochain des électeurs (CE, 29 juillet 2002, Election municipale de Dunkerque, n°239142). Ainsi, en principe, l’occasion ayant motivé l’inauguration peut être aussi bien la pose d’une première pierre que l’achèvement des travaux ou, plus classiquement, l’ouverture au public du bâtiment.

Dans les cas où ce principe n’est pas respecté, le Conseil d’Etat peut annuler l’élection, comme il l’a fait au motif que la date de deux inaugurations avait été artificiellement placée à proximité du scrutin : inauguration en mars 1995 d’une bibliothèque ouverte au public en décembre 1993 puis, entre les deux tours de scrutin, d’une station d’épuration qui fonctionnait depuis plusieurs mois (CE, 7 mai 1997, n°176788).

De même, le juge électoral a pu identifier une manœuvre susceptible d’entraîner l’annulation de l’élection en cas de répétition d’inaugurations dans un délai rapproché et sans justification, telles que dix-huit cérémonies d’inauguration de logements dans le cadre d’un projet placé sous l’égide de l’Association nationale pour la rénovation urbaine, avec remise symbolique des clés de leur logement aux anciens locataires accédant à la propriété et accompagnées de cocktails offerts à ces derniers et à leurs proches (CC, 29 novembre 2007, n°2007/3888-3967 AN, Eure-et-Loir, 1è circ.).

 

Me Philippe BLUTEAU, avocat, Cabinet Oppidum Avocats.