L’APVF, représentée par son Président délégué, Pierre Jarlier, a été auditionnée, jeudi 4 juin, par la mission d’information sur la refonte des critères d’attribution de la dotation d’équipement des territoires ruraux dont les rapporteurs sont les députés, C. Pirès-Beaune, J.R. Cazeneuve et J. Giraud. Une occasion de rappeler sa position en la matière.
Partant du constat d’une forte variabilité des enveloppes départementales d’une année sur l’autre, sans liens évidents avec l’objet de la dotation et les caractéristiques rurales des départements concerné, la mission s’est donnée pour objectif d’établir un état des lieux juridique et financier de la dotation, de définir les notions de ruralité et de population rurale et d’évaluer la pertinence de la répartition actuelle des enveloppes départementales.
Pierre Jarlier a introduit ses propos en rappelant que les dotations d’investissement finançaient de plus en plus d’éléments à crédits constants et que, face aux tensions budgétaires que nous connaissons, elles demeurent insuffisamment péréquatrices. Il est important de mieux tenir compte des fragilités et de la richesse du territoire pour cibler les subventions sur ceux qui en ont le plus besoin (critère du revenu par habitant). Et la gestion déconcentrée de la DETR y est favorable.
La mission d’information s’interroge sur la question de savoir si les critères d’éligibilité à la DETR et de répartition des enveloppes départementales permettent de cibler les territoires ruraux, et comment les faire évoluer pour atteindre cet objectif. La réponse à cette question implique de se pencher, préalablement, sur la notion même de « ruralité ».
L’APVF plaide pour une définition extensive et plus intégrée de la ruralité à travers la notion de « géographie rurale prioritaire » : il faut opter pour une approche nouvelle des espaces ruraux – qui ne soit pas en négatif de la définition de l’urbain – qui combine les critères de densité et ceux de « nature fonctionnelle » et qui permette de traiter du continuum entre les espaces les plus urbanisés et les espaces les plus isolés et peu peuplés.
D’ailleurs, les petites villes et les bourgs-centres, par leur fonction de centralité, jouent un rôle essentiel dans la structuration de l’espace rural en offrant aux habitants de leur bassin de vie une diversité d’équipements et de services indispensables à la vie quotidienne. Or, beaucoup d’entre eux sont aujourd’hui fragilisés. Il est primordial de soutenir et conforter ces fonctions de centralité, sans quoi c’est tout l’espace rural alentour qu’ils structurent qui risque d’en souffrir.
- Renforcer les critères de charge et mieux tenir compte des fragilités :
Actuellement, l’éligibilité à la DETR s’articule autour de cinq critères de ressources et de charges, indépendamment de la nature fonctionnelle et des charges de centralité. Pour l’APVF, la définition de nouveaux critères doit permettre de soutenir des projets participant du continuum entre les espaces les plus urbanisés et les espaces les plus isolés et peu peuplés. Les critères existants pourraient être combinés avec d’autres critères de charges : montant de dépenses d’équipement brut ; nombre d’équipements non communautaires utilisés par les habitants d’une autre commune ; éligibilité à la fraction « bourg-centre » de la DGF ; éligibilité à une convention ORT ou aux programmes « Cœurs de ville » ou « Petite ville de demain »…
Il faut, en outre, que la DETR soit ciblée sur les communes les plus fragiles. Par conséquent, il convient d’y intégrer des critères de richesse, comme celui du revenu par habitant.
- Un appui en ingénierie dans la constitution des dossiers :
La procédure de répartition des enveloppes de la DETR est déconcentrée à l’échelon local au niveau des préfets (arrêté préfectoral attribuant la DETR des communes et des groupements). Les collectivités locales sont elles-mêmes associées au travers de comités d’élus. L’APVF a toujours été favorable à l’alignement de la gestion de la DSIL sur le modèle de la commission DETR.
Néanmoins, ces modalités de gestion déconcentrées ne règlent pas tous les problèmes, et notamment celui de la difficulté d’accès des petites villes aux crédits pour deux raisons principales :
– la difficulté pour les petites villes de trouver les financements complémentaires nécessaires à l’obtention des subventions de l’Etat ;
– les territoires les plus éloignés de la préfecture sont parfois pénalisés : les crédits sont fléchés, en majorité, sur la ville principale et sa métropole (cela est particulièrement vrai concernant la DSIL).
Pour Pierre Jarlier, l’ingénierie doit relever de l’intercommunalité, c’est la bonne échelle. C’est sur ce principe que l’Etat doit accompagner les territoires. Dans ce sens, la création de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) est une opportunité dès lors qu’elle met en place une aide au montage des projets, et notamment pour les petites communes.
- Extension des pouvoirs des commissions DETR dans la définition des opérations éligibles :
En 2019, 53 % des petites villes touchent de la DETR, contre 22 % de DSIL. Elles sont 21 % à ne percevoir aucune subvention de soutien à l’investissement.
Les projets d’investissement financés en partie par la DETR et la DSIL sont principalement des projets de travaux d’accessibilité aux « personnes à mobilité réduite » (PMR) et de rénovation énergétique des bâtiments publics, conformément aux priorités nationales, mais également de rénovation ou construction de nouveaux équipements publics, notamment scolaires/périscolaire, sportifs et culturels. Certains projets portent sur l’aménagement des espaces urbains et de dynamisation des centres-villes, et sont le plus souvent portés par la DSIL.
Finalement, force est de constater que les projets ainsi financés répondent plus à la liste des opérations définies comme prioritaires au niveau national qu’à des projets structurants. Dans ce sens, Pierre Jarlier a rappelé l’intérêt de l’ancienne répartition DGE et DDR qui permettait une allocation distincte des crédits. A cette fin, on pourrait envisager de réserver une part de la DETR pour soutenir les projets individuels des communes et une mettre en place une enveloppe “contractualisation” à destination des EPCI en faveur des projets structurants.
Il serait peut-être opportun que les pouvoirs des commissions DETR, concernant la définition du champ des opérations éligibles en dehors de la liste nationale, soient renforcés.
Aussi, sur la composition des commissions , Pierre Jarlier a indiqué que le nombre de membres pouvait être préjudiciable tant les propositions sont divergentes.