Brexit : les britanniques retiennent leur souffle alors que débat parlementaire s’intensifie

24 octobre 2019

Situation complètement ubuesque à Londres : après avoir voté l’obligation d’une sortie avec accord, le Parlement a voté samedi dernier l’obligation d’adopter tout projet de loi faisant référence au Brexit, avant d’acter le Brexit lui-même. Boris Johnson demande le report du Brexit, comme le veut la loi, mais joint un second courrier dans lequel il explique ne pas en vouloir.

Nouvel épisode dans la déjà longue série du Brexit outre-Manche. Après avoir contraint Boris Johnson par la loi (Le ‘Benn Act’) de trouver un accord avec l’Union européenne, et à défaut d’être tenu de demander un report dans cette attente, le Parlement britannique a de nouveau défié son Premier Ministre ce samedi.

Par 322 voix contre 306, la Chambre des Communes a adopté l’amendement Letwin, du nom de son auteur. Concrètement, cet amendement prévoit qu’un Brexit ne peut être entériné sans que tous les projets de lois faisant référence au Brexit ne soit d’abord adoptés. Officieusement, et Sir Oliver Letwin ne s’en cache pas, c’est « une police d’assurance » contre « un no-deal accidentel ». A défaut de pouvoir anticiper ce que Boris Johnson a en tête pour obtenir sa sortie sans accord tant désirée, il s’agissait de le bloquer. Le vote sur le Brexit lui-même, se retrouve donc ajourné. Ce n’est que le n-ième mouvement dans une partie d’échecs, au propre comme au figuré.

Boris Johnson n’a pas tardé à réagir. Comme la loi l’y contraint, il a officiellement demandé un report du Brexit, dans un courrier laconique ressemblant à un e-mail, sans entête et non signé. Mais comme rien ne l’y interdit, il a ajouté un deuxième courrier, plus long, avec signature et entête officielle, pour prévenir les autorités européennes que bien que contraint à demander un report, il ne changerait nullement d’orientation politique et assurait s’opposer à cette demande de report et n’avoir aucune intention de le négocier. Michael Grove, bras droit du Premier Ministre a ainsi déclaré dimanche que malgré cette demande « nous allons sortir le 31 octobre ». Les partisans d’un Brexit dur ont maintenant en tête de saborder tous les projets de loi, pour précipiter un « no-deal ». Un troisième courrier, émanant cette fois de l’Ambassadeur britannique près l’Union européenne, informe le secrétaire général du Conseil européen que la législation en vue d’inscrire le Brexit dans la loi sera introduite « au Parlement la semaine prochaine ».

Au-delà de la bataille politique féroce, tout le monde est dans le flou sur ce qui peut concrètement intervenir d’ici au 31 octobre. Côté européen, on se prépare à voter le Brexit cette semaine, car « le parlement britannique n’a pas rejeté l’accord donc il n’y a pas lieu de changer de cap » dit-on de source diplomatique.

Selon les propos d’un diplomate rapportés par Le Monde le 20 octobre, « C’est une architecture sophistiquée », « on va regretter les Britanniques, il y a de la stimulation intellectuelle ».

Quoiqu’il en soit des différents scenarii possibles, les élections législatives anticipées paraissent incontournables. La question étant celle du timing. Il suffit au Parti travailliste de présenter une motion de censure, ce qu’il s’est refusé à faire pour éviter la sortie sans accord. Il privilégierait toujours, à ce stade, de réclamer un nouveau référendum.

Que se passera-t-il le 31 octobre ? Et d’ici-là ? La suite au prochain épisode…