Franck Lacroix, Directeur général TER, SNCF : “Nous voulons être plus proches des territoires et plus accessibles à tous”.
De nombreux élus s’alarment dans les territoires, de la disparition de certains services. Vous-mêmes, à la SNCF, avez récemment suscité chez certains élus locaux la crainte de voir disparaître le train. Pouvez-vous nous rassurer sur l’engagement de l’entreprise ?
Que ce soit pour la grande vitesse ou pour la mobilité du quotidien, l’offre train en France augmente. Notre stratégie est claire : nous cherchons à offrir plus de trains dans un système de mobilité partagée plus fluide, plus connecté, multimodal. Naturellement, nous devons nous adapter, partout, et optimiser les ressources et mieux coller à la réalité de la demande sur chacun de territoires. Mais l’ouverture à la concurrence doit profiter à tous, clients comme territoires, et participer à la réduction de la fracture sociale et territoriale. Nous avons bien conscience que l’opérateur historique, entreprise publique au service du public, a un rôle particulier pour relever ce défi.
Pour le TER, nous avons engagé avec les Régions une ambitieuse stratégie de conquête client. Nous voulons développer l’usage du train, avec plus de 200 000 voyageurs TER supplémentaires d’ici 2025. Et nous allons les chercher où ils sont, dans les villes et villages des périphéries des métropoles régionales comme au cœur des territoires.
En lançant l’offre lowcost OuiGo, SNCF a ouvert la porte de la grande vitesse à de nouveaux citoyens, et se développe à un rythme extrêmement soutenu. Le TGV participe également à l’irrigation des territoires, dans le cadre de la desserte classique des villes mais aussi avec des dispositifs permettant de faire bénéficier de ses atouts un plus grand nombre de voyageurs. Les modèles sont multiples : une convention spéciale avec la Région en Bretagne, des places offertes aux abonnés TER dans d’autres Régions, ou encore l’offre TER-GV au sein de la convention TER en Hauts-de-France. Et nous avons l’intention de renforcer ce type de dispositif, comme en témoigne notre offre de +43% de TER-GV en Région Haut-de-France.
Il y a aussi des craintes sur les lignes menacées par l’état des infrastructures. Nous sommes résolus à participer à leur préservation. Un vaste programme d’innovation est engagé pour proposer aux Régions des solutions adaptées et soutenables, en complément de la démarche engagée par SNCF Réseau.
Concrètement, qu’allez-vous mettre en place pour séduire de nouveaux voyageurs et notamment ceux qui se sentent parfois exclus du transport ferroviaire ?
Pour commencer, nous réorganisons l’offre TER autour de 3 produits : CITI, KRONO et PROXI. CITI c’est le transport urbain et fréquent pour décongestionner l’accès aux villes comme par exemple entre Le Verdon et Bordeaux, une ligne qui permet aux habitants des villes du Médoc de rejoindre Bordeaux facilement. KRONO, le transport rapide et confortable pour relier les grands pôles urbains entre eux comme entre Cherbourg et Caen. PROXI, c’est le transport au plus près des territoires comme entre Angers et Saumur. C’est le train dit parfois omnibus qui dessert toutes les petites communes. Notre objectif : N’oublier personne. Et pour chaque besoin, une offre adaptée, simple, lisible.
Nous avons également décidé de transformer notre dispositif de vente. En complément des solutions digitales, SNCF va élargir les possibilités d’achat par téléphone dans les prochains mois. TER va aussi proposer une large palette de solutions à déployer sur mesure avec les élus des villes intéressées comme les boutiques mobiles, ces camionnettes qui vont à la rencontre des clients dans les lieux de vie, comme celle qui est tous les mercredis matin sur le marché de Pacé à 10 km de Rennes. Vous pouvez y acheter votre billet TER comme TGV. Nous testons aussi des visio-services comme à Pont-l’Evêque en Normandie et des visio-guichets à Challans par exemple pour permettre aux voyageurs de dialoguer avec nos agents via la vidéo. Et nous allons largement développer notre réseau de partenaires comme la supérette de La Suze sur Sarthe ou le buraliste de Pont de Buis pour faciliter l’achat de titres TER comme TGV dans les villes et villages.
On reproche aussi à la SNCF de manquer de dialogue avec les élus des villes et des villages desservis. Que répondez-vous ?
Les élus m’ont en effet clairement adressé ce reproche. Et d’ailleurs la réforme ferroviaire nous invite à plus de concertation avec les parties prenantes. Et bien : message reçu !
Pour TER, j’ai donc décidé de poursuivre la décentralisation de notre fonctionnement, en créant des Directions de Lignes. Centrées sur un territoire plus petit, dotées de leurs moyens de production et très orientées clients, elles privilégieront la concertation avec les élus et la proximité avec les voyageurs. Elles déploieront le nouveau dispositif de vente, développeront la polyvalence de notre personnel et sa mobilité en organisant la présence programmée d’équipes commerciales dans les gares, y compris les plus petites d’entre elles.
La concertation, ça marche ! Nous avons déjà de belles réussites, comme dans le Cantal à Saint-Flour ou en Bourgogne Franche Comté à Cercy-la-Tour et Luzy où nous avons trouvé ensemble des solutions de ventes adaptées. Les élus locaux nous challengent et ils ont raison. C’est ensemble que nous trouvons les meilleures solutions.