Fonction publique territoriale : le recours élargi aux contractuels aux postes de direction suscite des réserves

5 juillet 2018

Lors de l’examen consacré au projet de loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » par l’Assemblée nationale, le gouvernement a fait adopter un amendement au texte initial pour permettre l’ouverture du recrutement aux contractuels pour les postes de direction des collectivités, dits « emplois fonctionnels ». Une proposition de réforme qui suscite le débat et les critiques.

L’amendement voté en première lecture à l’Assemblée nationale aboutit à l’ajout d’un article 65 ter disposant que « les emplois visés à l’article 53 (de la loi du 26 janvier 1984) peuvent être pourvus par la voie du recrutement direct ». Concrètement, il offre la possibilité de recruter par voie contractuelle :

– les DGS et DGA dans les communes de plus de 2.000 habitants ;

– les DGST et DST dans les communes de plus de 10.000 habitants ;

– les DG, DGA et DGST des EPCI de plus de 10.000 habitants.

Jusqu’ici, cette possibilité de recrutement par voie contractuelle n’est possible que pour les cadres dirigeants des communes et EPCI de plus de 80.000 habitants.

Selon le gouvernement, « plus de 7.000 » postes seraient concernés par cette mesure, qui a pour objectif « d’élargir les viviers de recrutement sur les emplois de direction » et de permettre aux employeurs publics « de s’adjoindre des compétences spécifiques ».

Les réactions ne se font pas fait attendre. Philippe Laurent, Vice-Président de l’APVF et Président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) s’est montré critique à l’égard de cette mesure, jugeant qu’elle ne répond à aucune demande des employeurs territoriaux et que le gouvernement a agi dans la précipitation et sans concertation avec les associations représentatives des collectivités territoriales.

Le syndicat national des directeurs généraux de collectivités territoriales (SNDGCT) et l’Association des Administrateurs territoriaux de France (AATF) ont naturellement dénoncé cette nouvelle rédaction législative sur le fond, estimant que :

– du fait de l’arrivée de cadres issus du privé, les collectivités seraient exposées à une pression permanente au renchérissement des rémunérations, avec un creusement des écarts salariaux entre agents ;

– cela pourrait aboutir à multiplier les « recrutements à risques », c.-à-d. « marqués politiquement » – et les situations de conflits d’intérêt, préjudiciables in fine aux élus du fait du risque juridique ;

– l’absence de concertation avec les employeurs publics locaux et les organisations syndicales, ainsi que l’absence d’étude d’impact entachent la mesure sur le plan de sa légitimité.

Arrivé au sénat, les sénateurs ont profité de l’examen en Commission des affaires sociales pour supprimer l’article 65 ter, qui proposait d’étendre la possibilité de recruter des emplois de direction en direct, sans passer par le concours. La plupart des arguments précédemment cités ont servi à nourrir le vote d’amendement ayant conduit à la suppression de l’article 65 ter.

Si l’APVF ne s’oppose pas par principe au développement de certaines souplesses, plusieurs pistes d’ajustements peuvent être étudiées selon notre association :

  1. le plafonnement de la rémunération des contractuels ;
  2. le plafonnement de la proportion de contractuels par collectivité.
  3. L’ouverture des emplois fonctionnels à davantage de fonctionnaires : le décret n°87-1099 du 30 décembre 1987 portant statut particulier du cadre d’emplois des attachés territoriaux interdit le recrutement d’un attaché territorial hors classe sur un emploi de DGS dans une commune de moins de 10.000 habitants. L’objectif du Gouvernement d’accroître la souplesse de recrutement pour les employeurs publics commanderait à tout le moins de supprimer cette contrainte, afin de permettre le recrutement de tels attachés dans toutes les petites villes.

 

Ces pistes vont être transmises au cabinet d’Olivier Dussopt, Secrétaire d’état à la Fonction publique.