Conférence nationale des territoires : vers un assouplissement des contraintes financières ?

14 décembre 2017

Afin d’atteindre la trajectoire globale de solde des administrations publiques, le projet de loi de programmation consacre deux dispositifs : le premier pour maîtriser les dépenses locales (les contrats d’objectifs) et le deuxième pour maîtriser l’endettement local (la règle d’or renforcée).

Le Premier ministre, lors de la conférence nationale des territoires qui s’est déroulée le 14 décembre, a annoncé que la règle d’or renforcée (ratio de dette / capacité d’autofinancement) serait supprimée du projet de loi de programmation. De nombreuses petites villes étaient concernées par ce dispositif. Elles devraient donc être définitivement épargnées. 

S’agissant des contrats d’objectifs, le Premier ministre a annoncé que certaines recommantions de la mission "finances locales" pilotée par Alain Richard et Dominique Bur seront intégrées dans le projet de loi de programmation et soumises aux discussions parlementaires.   

Aujourd’hui, deux objectifs contraignants sont fixés à l’article 10 du projet : les objectifs d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement (1,2 % de moindre dépense) et de réduction du besoin de financement (13 Mds). 

Leur caractère contraignant résulte de trois éléments : ils pourront être contractualisés et sanctionnés en cas de dépassement. Ils supposeront des contreparties de l’Etat.

Les petites villes, en l’état actuel du texte, sont concernées pour plusieurs raisons : elles pourront contracter avec l’Etat, le régime des sanctions n’est pas à ce jour réservé aux collectivités contractantes, et, si notre Président tient ses promesses, elles bénéficieront de toute façon de contreparties. 

Les objectifs contraignants d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement et de réduction du besoin de financement s’imposent à l’ensemble des collectivités mais selon modalités et des degrés différents. Cela n’est pas remis en cause par le Premier ministre. 

Ils sont déclinés par catégorie de collectivités et pour les communes, l’objectif d’évolution des dépenses est plus sévère : il est de 1,1 % .

Ils sont contractualisés ou non contractualisés. Lorsqu’ils sont contractualisés, ils tiennent compte des difficultés financières particulières (proportions inconnues).

Les objectifs d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement et du besoin de financement sont contractualisés avec les collectivités territoriales qui « prennent le plus part aux dépenses publiques », déterminées, pour l’heure, en fonction d’un critère de population.

Les contrats d’objectifs et de moyens sont obligatoires pour l’ensemble des régions et des départements, les EPCI à fiscalité propre de plus de 150 000 habitants et les communes de plus de 50 000 habitants.

Pour « toutes les autres » collectivités territoriales, les contrats sont facultatifs.

Afin d’élargir le champ d’application des contrats, et contraindre plus fortement la dépense publique locale, le rapport intermédiaire de la mission préparatoire au pacte financier Etat-collectivités territoriales, pilotée par A. Richard et D. Bur, propose de substituer un critère de seuil de dépense réelle de fonctionnement (DRF) au critère de population.

Le rapport préconise de fixer un seuil de dépense, de 30 millions d’euros, au-delà duquel les communes et les EPCI seront obligées de contracter avec l’Etat. Il serait élargi aux budgets annexes. Mais, le Premier ministre, lors de la CNT, a proposé une autre option qui consisterait à intégrer les collectivités qui ont un budget principal supérieur à 60 millions d’euros dans le dispositif contractuel. 

Donc, si rien n’est encore très clair, la suppression du critère de population se dessine malgré tout. 

L’article 10 du projet prévoit des sanctions en cas de dépassement des objectifs qui pourront porter sur l’ensemble des concours financiers et recettes fiscales affectées. En l’état du texte, on ne sait pas si les collectivités qui ne contractent pas peuvent être sanctionnées.   

La mission Richard/ Bur propose, pour parer cette lacune, de réserver le mécanisme de sanction aux collectivités contractantes.

Les collectivités concernées par le contrat qui dépassent les objectifs sont soumises à un mécanisme de reprise financière dont le montant serait entre 50 % et 75 % du montant du dépassement constaté.  Pour les collectivités concernées mais qui ont refusé de signer, la sanction serait plus sévère : reprise financière comprise entre 75 et 100 %. La mission proposait, afin de préserver la libre administration, que la reprise ne dépasse pas un certain plafond de recettes réelles de fonctionnement. Le Premier ministre lors de la CNT propose de relever ce plafond à 3 %.  

Selon les recommandations de la mission, les collectivités qui ne sont pas concernées par les contrats ne pourront pas être sanctionnées en cas de dépassement.

Enfin, alors que le projet de loi ne prévoit aucune engagement réciproque de l’Etat, la mission Richard Bur propose des contreparties collectives (indépendantes du contrat) et des contreparties individuelles pour les collectivités contractantes qui respectent leurs objectifs.

Pour les contreparties collectives, l’Etat s’engagerait à maîtriser ses normes et leurs coûts. Il s’engagerait également à stabiliser les dotations. Pour les collectivités qui contractent et qui respectent leurs objectifs pourraient déroger aux normes réglementaires à titre expérimental et avoir des facilités d’accès aux crédits d’investissement. Avec une réduction  consécutives des crédits alloués au titre de la DSIL et de la DPV pour les collectivités qui ne contractent pas. Le Premier ministre lors de la CNT a également repris ces éléments du rapport. 

Les discussions de seconde lecture au Parlement, suite à l’échec de la commission mixte paritaire, s’annoncent riches.