Projet de loi numérique : l’APVF rencontre la ministre Axelle Lemaire

2 décembre 2015

L’ouverture des données publiques par les villes : l’APVF pose les bonnes questions

Après avoir présenté l’association, ses caractéristiques et son positionnement, l’APVF a demandé à la ministre des précisions quant à la politique d’ouverture des données applicable aux collectivités qui est prévue par le texte. Le projet de loi Numérique laisse à la loi portant Nouvelle organisation territoriale de la république (loi NOTRE) le soin de fixer le cadre en matière d’ouverture des données publiques pour les communes : tous les documents administratifs (dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions et décisions) émanant des collectivités dans le cadre de l’exécution de leur mission de service public, déjà disponibles sous forme électronique, devront faire l’objet d’une politique d’ouverture des données à l’aune de ce projet de loi.

L’APVF s’est déclarée favorable à la politique d’open data applicable aux collectivités mais a fait part à la ministre de ses interrogations sur d’éventuels problèmes de confidentialité, de sécurité, mais aussi de logistique. Dans une collectivité, de nombreux documents, y compris certaines données sensibles, existent sous format numérique.

De fait, l’obligation de tous les publier constitue pour l’APVF une source potentielle de contentieux administratifs. C’est pourquoi l’APVF a demandé à la ministre quel était le degré de sélection et de discrétion laissé aux exécutifs locaux pour la publication des documents. Un exemple concret a été donné : les notes internes à la mairie émanant des collaborateurs de cabinet devront-elles faire l’objet d’une publication ?

La ministre s’est voulue rassurante sur le sujet et a affirmé que la loi NOTRE qui s’appuie sur la loi CADA pour dessiner la politique d’open data des collectivités laisse à l’exécutif local une certaine discrétion en la matière : « les petites villes pourront publier tout ce qui est utile à leur sens ». Selon la ministre, les dispositions relatives au secret prévues la loi CADA sont des garanties qui permettront aux maires de sélectionner les « documents publiables » sur le site de la collectivité.

La ministre a reconnu que la rédaction de la loi sur ce sujet pouvait légitimement faire naître des craintes de la part des élus, elle a insisté sur l’effort de pédagogie qui devrait être fait sur le sujet. Elle compte entre autre sur les associations d’élus pour faire ce travail d’explication et de pédagogie. La ministre a également évoqué la création d’un guichet unique de la CADA.

 

 

L’APVF évoque la réalité du terrain : celle des villes situées en zones grises et blanches

 

Sur le plan technique, l’APVF a rappelé à la ministre que près de 4000 villes, dont un tiers de petites villes se situent aujourd’hui dans des zones blanches ou grises et qu’il serait par conséquent très difficile pour ces collectivités d’appliquer une politique d’ouverture de leurs données via les outils numériques. L’APVF a proposé que la politique d’ouverture des données applicable aux collectivités se calque la réalité de la couverture réseau du territoire via avec le Plan Très haut débit à l’horizon 2022 dans un souci d’égalité des territoires.

La ministre a reconnu qu’il y avait là un vrai sujet : elle s’est dite prête à étudier toutes les options possibles du point de vue des mutualisations des politiques partenariales intercollectivités pour permettre la publication des données. Le département et/ou la région pourraient mettre en place des plateformes de façon à organiser l’open data des collectivités sur un territoire donné. Selon la ministre, une solution émergera sur ce sujet avec les discussions parlementaires.

 

« Données d’intérêt général » : l’APVF se réjouit d’un basculement réglementaire sur le sujet des DSP

 

Concernant l’ouverture des « données d’intérêt général » dont dispose le texte qui créera l’obligation pour les entreprises privées en délégation de service public (DSP) de fournir « sauf stipulation contraire » à la personne morale de droit public, les données et bases de données collectées ou produites à l’occasion de l’exploitation du service public ; l’APVF, par la voix de Loïc Hervé, s’est dite très favorable à un tel mouvement règlementaire. Cela permettra une meilleure information de certains élus associés à des délégations de service public, une meilleure gouvernance des services et renforcera les DSP.

La ministre a proposé à l’APVF de travailler sur une proposition d’amendement afin de mieux organiser cette transmission des données et des informations entre la personne privée et la collectivité. La ministre a également rappelé que le projet de loi Numérique visait de façon générale à une meilleure fluidité de l’information entre les personnes morales de droit public (administrations, collectivités territoriales, établissements publics etc.) en rappelant que les collectivités pourront désormais recourir au droit opposable prévu par la loi CADA.

 

La question de l’accessibilité des sites et des services

 

En l’état, le projet de loi crée également des obligations à la charge des administrations et notamment des collectivités locales pour développer l’accessibilité des sites internet aux handicapés. Les sites des collectivités devront afficher « une mention visible précisant s’il est ou non conforme aux règles relatives à l’accessibilité́ ». En cas de non-mise en conformité avec ces exigences d’accessibilités, des amendes sont prévues. Le montant de ces amendes sera fixé par décret en Conseil d’Etat, mais il ne pourra excéder 5000 euros.

Face aux doutes exprimés par les élus de l’APVF, notamment sur le sujet des sanctions, la ministre s’est montrée rassurante et a affirmé que des solutions concrètes seraient proposées aux collectivités pour l’accessibilité : l’Etat jouera pleinement son rôle de soutien en la matière.

La ministre a également assuré que les sanctions ne seraient appliquées que dans des cas extrêmes et qu’elle comptait sur du mimétisme et de la diffusion de bonnes pratiques entre collectivités pour développer l’accessibilité des sites et des services.

Les élus de l’APVF lui ont rappelé que toutes les villes ne disposaient pas de connexion internet viable, ni de site internet. La ministre a reconnu qu’il y avait là un vrai sujet et a invité les associations d’élus à faire un travail de recensement des villes en question et à les informer des chantiers à engager.